On the road again – Oregon & État de Washington
- CoolinClassic

- 16 mars
- 7 min de lecture
Août 2024

Puisque la majorité a voté, nous sommes en direction du lycée d’High School Musical et de Temple Square, le QG de l'Église de Jésus-Christ des Saints des derniers jours, une religion fondée au XIXème siècle par Joseph Smith. Dans ce petit musée qui retrace leur histoire, avouons qu’ils étaient de vrais aventuriers avant de devenir de redoutables hommes d’affaires. Maghnia et moi nous rendons à l’office du dimanche de l’Église. Je comprends mieux ma première visite au pays. Si l’on m’avait interdit l’entrée d’un lieu de culte, c’est parce qu’il s’agissait d’un temple. Leur conquête spirituelle était parallèle à celle de l’Ouest. Les symboles de celle-ci sont partout présents, de la Wells Fargo (à Cody) au Pony Express (Salt Lake City). Nous nous rapprochons du Grand Lac Salé et rallions les régions particulièrement inhospitalières de l’ouest du quatrième lac endoréique du monde (4.400 km en moyenne). À Spiral Jetty, l’artiste Robert Smithson a choisi le désert pour faire sa courbe plane de 457 mètres de long et de 4,5 mètres de large. Non loin d’immenses champs de panneaux solaires, nous sommes sur le lieu de rencontre des lignes ferroviaires de l’Union Pacific et de Central Pacific (1869), un petit pas pour l’homme, un immense pas pour l’histoire du pays ! C’est le jour du barbecue pique-nique dominical de nombre de familles latinos qui se sont installées au bord du réservoir Pineview. Mes oreilles traînent… Pas de doute, c’est 100% cumbia, 100% espagnol, 0% mélange !
Nous prenons la piste de l’Oregon, jadis utilisée par les pionniers partis du Missouri ; elle fut la principale voie terrestre franchissant les Rocheuses, avec celle de la Californie. Les affamés de l’Est, venus de la piste Bozeman (du Montana) participer à la ruée vers l’or, ont façonné l’histoire des territoires « vierges » de toute « civilisation ». La fièvre de l’or californienne ramena ainsi des milliers de colons dans l’Or(egon). Sur la route, nous nous recueillons sur la tombe de celui qui écrivit Paris est une fête. Ma ville de naissance doit l’être en cette période olympique ! Notre hébergement, une cabane pour « chasser » l’ours, manque de tout, surtout de couvertures ! C’est à regret que nous bifurquons vers plus de confort. Sur la route de l’Idaho, le site historique de Minidoka nous plonge dans une histoire bien dégueulasse... Treize mille Nippo-Américains, considérés comme des traites par le gouvernement fédéral américain pendant la Seconde Guerre mondiale, furent internés – de manière totalement inconstitutionnelle – en plein désert de l’Idaho aux côtés de leur famille. Entouré de barbelés, le centre de réinstallation s'étendait sur 34.063 acres et était divisé en zones fonctionnelles distinctes. Nous lisons des témoignages assez forts de cette histoire méconnue. Deux baraquements sont sur le chemin d’un petit sentier mémoriel. « An American Concentration Camp » peut-on lire sur le site du National Park Service. Un camp de concentration, vraiment ? Qu’importe, car « Minidoka preserves the legacy and teaches the importance of civil liberties. »... Au cœur du monument national qu’est Craters of the Moon, situé dans la plaine du Snake, nous sommes sur la Lune. Les grandes coulées de lave qui s'étendent le long du rift de l'Idaho, nous sommes au cœur d’un tableau de Jérôme Bosch : la lave en fusion a enlacé des arbres brûlés. Le vent souffle sur la crête des collines volcaniques, c’est irréel. Dans la caldeira du volcan Mazama, malheureusement dans la brume et la fumée des feux de forêt, on pourrait aisément réutiliser cet adjectif ; l’île Wizard semble flotter en son sein. Pendant que les filles cherchent un énième Dollar Tree non loin de la U.S. Route 97, nous visitons le High Desert Museum, un établissement partenaire – comme le Buffalo Bill Center – du Smithsonian. Il est question des Indiens des Plateaux. Nous apprenons, avec étonnement, être dans le haut désert d'Amérique du Nord, le Grand Bassin. Si Chemult ressemble plus à une aire d’autoroute assez glauque qu’à une petite ville pittoresque, elle fera l’affaire pour la nuit. Dès le départ d’un motel aux airs de Pyschose qui nous a permis de passer la nuit pour un prix très décent, Maghnia prend son pied sur les routes sinueuses des forêts tempérées humides sombres de l’Oregon. La chaîne des Cascades est un arc volcanique, qui s’étend jusqu’aux mont Rainier plus au nord. La route remonte vers Emerald City (Eugene), la ville du géant Nike. Hayward Field, propriété de l’Université d’Oregon, est ainsi devenu un stade mythique pour les fans d’athlétisme. Des années plus tard, je retrouve les rives du Pacifique, cet océan qui m’a fait fantasmer toute ma jeunesse. Nous arrivons par les dunes de l’Oregon, la plus grande étendue de dunes de sable côtières en Amérique du Nord. Quarante miles de bande de sable, des dunes dépassant parfois les 150 mètres, qui l’aurait dit ? Voici venu le temps de la remontée vers le nord, de la U.S. 101, une route de 2.400 km reliant San Diego à Olympia. C’est justement là-bas que nous nous rendons.
Le Lonely Planet a fait de l’itinéraire qui longe la côte du trente-troisième État de l’Union une « route mythique ». Nous sommes dans la partie océanique d’un territoire où se côtoient également les climats méditerranéen, désertique et alpin. C’est parti pour la remontée jusqu’à Astoria, la ville des Goonies. Nous passerons par Cape Perpetua, Newport, Lincoln City ou Tillamook. La route qui lèche l’océan est, parfois, somptueuse. C’est à Cannon Beach que se situe la dernière scène du film générationnel modelé par le trio Spielberg-Columbus-Donner. Rappelez-vous du bateau du pirate Willy le Borgne s’en allant vers le large ! Mes copines Julie et Audrey ont, de suite, reconnu le paysage ! Devant l’énorme monolithe Haystack Rock, des mares résiduelles donnent un air féérique à l’étendue de sable. Plus au sud, nous voyons une colonie de lions de mer jouant près du rivage. Un bruit un peu assourdissant nous alerte. Une colonie énorme de ces espèces d’otaries a squatté une jetée artificielle de la ville portuaire de Newport. Quel spectacle ! Agréables en été, malgré des pluies éparses, ces régions côtières sont régulièrement battues par des tempêtes l’hiver venu. À Astoria, nous sommes sur la piste Lewis et Clark. Le « passage vers l'Ouest » rêvé par Thomas Jefferson, permettant d'ouvrir une route commerciale vers le Pacifique, fut lancé en 1894, et fut la première expédition terrestre à traverser le futur territoire des États-Unis. La colonne de Meriwether Lewis, partie d’Illinois, rencontra celle de William Clark dans le Missouri ; ils atteignirent le Pacifique en 1805. On comprend que le succès de l’entreprise est dû à la présence de Sacagawea, une Native Sioux Shoshone, et d’un trappeur canadien-français. L’expédition permit l’étude des tribus amérindiennes, de la flore, la faune, la géologie. Rendons hommage à Alexander MacKenzie qui, avait déjà atteint le Pacifique en traversant les Rocheuses canadiennes dès 1793 !

Quand nous traversons le fleuve Columbia, mon sac est plus lourd de quelques habits d’une entreprise de Washington Sate, Columbia Sportswear Company. Deux immenses musiciens du Club des 27 ont disparu dans l’état. À Aberdeen, nous voilà devant la maison, puis le mémorial Kurt Cobain. Une partie de ses cendres ont été dispersées dans la rivière Wishkah, qui passe sous le pont. Dans la banlieue de Seattle, le Greenwood Memorial Park & Funeral Home abrite la tombe de celui que beaucoup considèrent comme le plus grand guitariste de l’histoire. Citons McLaughlin (« Jimi était révolutionnaire. Et, avec la Stratocaster et le Marshall, Jimi a tout mis en place. »), Neil Young (« Il ne faisait qu'un avec son instrument. Personne d'autre n'a amené la guitare électrique à ce niveau, et surtout depuis. Il était à des coudées au-dessus de tous. Pour le dingue de guitare que je suis, il représentait le maximum. »), BB King (« C'est le plus grand musicien que j'ai connu. »), Townshend de The Who (« S'il ne reste qu'un nom dans toute l'histoire du rock'n'roll dans cent ans, ne cherchez pas. »), Clapton (« Il avait un don énorme et une technique extraordinaire ») ou Zappa (« Hendrix est un des personnages les plus révolutionnaires de la culture pop, musicalement et sociologiquement parlant. »). C’est dans son album Jimi Blues et Voodoo Chile que je reconnais son génie ! Le temps de Twilight est venu. Les Cullen ont bien fait de choisir la pluvieuse et brumeuse Forks pour se cacher des rayons du soleil… Nous ne monterons pas plus au nord que Port Angeles ; deux biches se baladent dans le parking d’une supérette. Elle est une étape sur la route du parc national d’Olympique, célèbre pour ses forêts pluviales, ses paysages de montagne et ses zones côtières. Vampires et loups-garous, les forêts sombres de Washington sont pour vous ! Les panneaux préviennent : les pumas, aussi appelés cougars ou lions des montagnes, sont nombreux dans la région. Du haut de l’Hurricane Ridge Visitor Center, la forêt subalpine semble partout. Seattle est à deux pas. Tout y cher, et pour n’importe quoi. Bien trop ! La tour Space Needle ressemble même à une belle arnaque. L’incontournable marché Pike Place, l'un des plus anciens marchés de producteurs aux États-Unis, est situé face au premier Starbucks (1971) et à côté du Gum Wall, entièrement recouvert de chewing-gum usagés. C’est bien dégueulasse ! Les filles cherchent, en vain, un lieu de tournage de Grey’s Anatomy. De Seattle, je ne retiendrai que le Museum of Pop Culture, conçu par Frank Gehry en collaboration avec Dassault Aviation et financé par Paul Allen, le cofondateur de Microsoft, dont le siège est à vingt minutes de route. Pour les amoureux de science-fiction ou de fantasy, c’est un festival d’objets cultes, du Magicien d’Oz à Dark Crystal, en passant par Alien, Blade Runner, Terminator ou La planète des singes. Les guitares sont également à l’honneur. On y célèbre Nirvana, Buddy Holly, Muddy Waters, Hendrix, Stevie Ray Vaughan ou le favori de mon père, Woody Guthrie… Bref, on ADORE !

« La montagne » (mont Rainier), culminant à 4 392 mètres, et l’arc volcanique de la chaîne des Cascades, ne sont pas si loin. La « montagne couverte de neige » est surtout couverte de brume. Pour accéder au bord du lac Mowich, il faut s’armer de patience, car la route de terre fatiguée risque d’achever définitivement la vitre de notre 4x4. Il y fait très froid... Reprenons donc la route de Portland, une ville réputée écologique. Elle s’est spécialisée dans le multimédia (Silicon Forest), les vêtements de sport, les brasseries artisanales, la torréfaction (« coffee shops ») ou les « farmers markets », qui ont fleuri au cours des dix dernières années. Également pour les comics avec le troisième éditeur américain (Dark Horse), qui s’est spécialisé dans l’adaptation de films, et le plus important regroupement d'auteurs indépendants (Periscope Studio). Enfin, dans le recyclage des déchets… Étrange pour un centre-ville un peu crado et squatté par pas mal de marginaux ! À trois jours de quitter le pays, Maghnia choisit de célébrer la fin de sa trentième année à Las Vegas. Nos gros sacs déposés dans un magasin de vinyles d’un centre peu attractif, et nous voilà presque à l’aéroport, bien avant les premières lumières du jour. C’est un week-end très intense qui nous attend. « What happens here, only happens here » !























































Commentaires